AU BORD DU LAC D’ANNECY
I
Un nid dans la verdure au flanc du promontoire ;
Une fraîche oasis de châtaigniers ombreux ;
Un tendre reposoir sous un ciel amoureux ;
Un doux jardin vêtu de roses dans leur gloire ;
Un asile de rêve, un tranquille oratoire ;
Un Éden tout fleuri dans un climat heureux ;
Des buissons odorants au long des chemins creux
Où l’on croise parfois les troupeaux qui vont boire ;
Bords enchantés, ouverts sur un calme horizon ;
Flots bleus, sombres sapins, verts tapis de gazon,
Blanche maison, toujours par le ciel baignée ;
Lac limpide, où l’azur du ciel semble dormir ;
Balsamique parfum dont l’âme est imprégnée ;
Solitude, silence ! ô douceur ! ô Colmyr !
II
Le lac est bleu, si bleu qu’on songe au Paradis.
Reflet du ciel brûlant, son éclat me fascine ;
Voluptueux creuset vers qui l’âme s’incline,
Il porte tout l’été dans ses flots attiédis.
Tendre comme une femme, il offre aux yeux ravis
L’exquis enlacement de sa grâce câline,
Et, pour mieux savourer la minute divine,
J’étends sur le gazon mes membres engourdis.
Au lent déroulement de la lame indolente,
Une barque, là-bas, glisse, blanche et très lente,
Emportant tout l’amour dans son sillage heureux.
Seul, il est vrai, d’aimer ; tout le reste est mirage ;
Et, crois-moi, le bonheur a pour unique image
Un esquif toujours blanc sur un ciel toujours bleu.
III
Allégresse ! douceur ! reflets ! clarté sereine !
Exquis matin d’automne ineffable et charmant,
Quels mots exprimeraient le pur enchantement
Qui m’inonde à longs flots de grâce souveraine ?
Terrasse en fleurs, asile où guérit l’âme en peine ;
Lac bleu, coupe d’oubli, vase d’apaisement ;
Azur d’un ciel ému qui mêle en ce moment
À l’élan de l’amour la douceur franciscaine.
Je vous aime, beau lac, ciel bleu, lointains sommets,
Chers souvenirs gravés dans mon cœur pour jamais ;
Air tiède et parfumé dont s’emplit notre chambre.
Et je cueille ardemment la fine volupté
De ce séjour de rêve où nous aurons goûté
Le charme délicat des roses de septembre.
Gaston Destrais, in La France est un pays charmant, imprimerie J. Aubert et Cie, 1931. Et reproduit dans la revue Lac d’Annecy & vallée de Thônes n° 130 du 15 mai 1932.
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